Le Pouvoir Sacré des Menstrues : Réappropriation d’un Héritage Spirituel Confisqué

Introduction

Depuis des millénaires, les menstruations des femmes ont été diabolisées, cachées ou considérées comme « impures » par les systèmes patriarcaux. Pourtant, dans les traditions préhistoriques et chamaniques, le sang menstruel était vénéré comme une force de vie, une connexion directe à la magie de la Terre et aux cycles cosmiques. Cet article déconstruit les peurs masculines projetées sur les règles, révèle leur véritable puissance spirituelle, et invite les femmes à se réapproprier leur corps comme un temple cyclique de sagesse.

I. La diabolisation des règles : Comment les hommes ont volé le pouvoir menstruel

1. L’inversion patriarcale : Du sacré à l’impur

Dans les sociétés matriarcales ou égalitaires (comme celles de la vieille Europe néolithique, des cultes de Kali en Inde ou d’Oshun en Afrique), le sang menstruel était :

  • Une offrande à la Terre-Mère (enterré pour fertiliser les sols).
  • Un outil de divination (les femmes étaient consultées pendant leurs lunes pour leurs visions).
  • Un symbole de souveraineté (les reines-prêtresses, comme les Druidesses celtes, dirigeaient les cérémonies en phase avec leur cycle).

Mais avec l’avènement de certaines voix spirituelles ou religions patriarcales, trois stratégies ont été utilisées pour les stigmatiser, les proscrire, les réprouver :

  • Religieuse : « Tu enfanteras dans la douleur » (Genèse 3:16) → la Bible fait des règles une « malédiction ».
  • Médicale : Hippocrate et les médecins grecs parlent d’ »utérus errant » provoquant l’hystérie.
  • Culturelle : En Inde, les femmes sont exclues des temples ; en Islam, elles ne peuvent prier ; dans le judaïsme, elles sont niddah (impures), etc.

2. La peur masculine face au sang qu’ils ne comprennent pas

Les hommes ne saignent pas sans mourir. Ils ne créent pas la vie. Cette différence a engendré :

  • Un complexe d’infériorité spirituel → Ils ont construit des rituels de sang masculin (circoncision, sacrifices guerriers) pour imiter le pouvoir féminin.
  • Une peur de la magie intuitive → Le sang menstruel est lié à l’inconscient, aux rêves, à l’énergie lunaire – tout ce que le patriarcat rationaliste rejette. Des forces auxquelles les hommes n’ont pas accès et diabolisent.
  • Un contrôle des corps féminins → En déclarant les règles « sales », ils ont coupé les femmes de leur propre pouvoir.

3. La terminologie « Règles » : Comment le langage a désacralisé le cycle féminin

Le mot « règles », issu du latin regula (« règle », « ordre »), reflète une vision patriarcale et médicalisée du cycle menstruel. Contrairement aux termes « lunes » ou « menstruations » (du latin mensis, « mois »), qui évoquent une connexion cosmique ou naturelle, « règles » impose une idée de contrôle, de régularité mécanique – comme si le corps féminin devait se plier à une norme extérieure, plutôt qu’être écouté dans son rythme propre.

Pourquoi ce terme s’est imposé ?

1. Médecine patriarcale : Les premiers médecins (hommes) des XVIIIe-XIXe siècles ont décrit les menstruations comme un « dérèglement » à normaliser, une « évacuation nécessaire » plutôt qu’un processus sacré.

2. Religion et morale : L’Église a encouragé ce vocabulaire pour détacher les femmes de leur pouvoir cyclique, en le réduisant à une simple fonction biologique, voire une punition (cf. la « malédiction d’Ève »).

3. Capitalisme et hygiénisme : Avec l’industrialisation, les protections périodiques ont été commercialisées en insistant sur la discrétion et la propreté, renforçant l’idée que les règles devaient être « régulées », cachées, aseptisées.

Réapproprier les mots pour réapproprier le pouvoir

Aujourd’hui, des femmes revendiquent des termes comme « lunes » (lié aux cycles cosmiques), « mois lunaire » (traduction directe de mensis), ou « saigne » (pour désacraliser la honte). Changer de vocabulaire, c’est :
Rendre au cycle sa dimension spirituelle et intuitive.
Refuser la vision pathologisante du corps féminin.
Affirmer que nos règles ne sont pas un « dysfonctionnement », mais une sagesse ancestrale.

« Appelez ça comme vous voulez, mais sachez que ce sang porte en lui la mémoire de celles qui, avant nous, en faisaient une offrande. »

II. La véritable puissance des Lunes : Pourquoi les menstrues sont une force spirituelle

1. Le sang menstruel, un pont entre les mondes :

Dans les traditions chamaniques, le sang est toujours un véhicule d’énergie. Mais le sang menstruel est unique car :

  • Il contient des cellules souches (pouvoir de régénération).
  • Il est cyclique (comme la Lune, les marées, les saisons).
  • Il est produit sans violence (contrairement au sang versé dans la guerre).

Applications spirituelles :

  • Rituel de pleine lune : Écrire ses intentions avec son sang, puis les brûler pour les manifester.
  • Offrande à la Terre : Enterrer son sang pour renouer avec les énergies telluriques.
  • Cercles de femmes : Saigner ensemble amplifie l’intuition et la connexion spirituelle.

2. Les menstrues comme état de perception accrue

Pendant leurs lunes, les femmes :

  • Entrent en résonance avec leur intuition (beaucoup de chamanes disent recevoir des messages à ce moment-là).
  • Sont plus sensibles aux énergies (d’où la fausse croyance qu’elles « attirent les mauvais esprits » – en réalité, elles perçoivent simplement plus).
  • Détiennent un pouvoir de manifestation accru (comme pendant la pleine lune, période idéale pour les sorts).

Exercice pratique :
Tenir un
journal lunaire pour noter :
✔ Les rêves et intuitions pendant les règles.
✔ Les synchronicités.
✔ Les idées créatives qui émergent.

Etc…

3 . Masculin/Féminin : Réapprendre à Dialoguer

  • Ce que les hommes gagnent à comprendre les règles :

Comment les hommes peuvent-ils (enfin) écouter les femmes parler de leurs règles ?

Plutôt que de craindre ou d’ignorer ce sujet, les hommes ont tout à gagner à poser des questions respectueuses et à écouter sans jugement lorsque les femmes partagent leur expérience des règles. Voici pourquoi – et comment – s’y prendre :

Ce que les hommes peuvent demander (avec bienveillance) :

  • « Comment vis-tu ton cycle au quotidien ? » (au lieu de « Tu es de mauvaise humeur, c’est tes règles ? »)
  • « Est-ce que certaines traditions ou rituels autour des règles t’inspirent ? »
  • « Comment puis-je mieux te soutenir pendant cette phase ? »

Les bénéfices pour vous, chers lecteurs :

  1. Comprendre (enfin) le corps féminin : Les règles ne sont pas une « maladie mensuelle », mais un processus physiologique et énergétique complexe.
  2. Développer votre intelligence intuitive : En écoutant ces cycles, vous apprenez à penser en rythmes, pas en ligne droite.
  3. Améliorer vos relations : Un homme qui comprend les fluctuations hormonales devient un meilleur partenaire, père ou ami.
  4. Se reconnecter au sacré : Dans les sociétés pré-patriarcales, les hommes initiés protégeaient les espaces menstruels – non par contrôle, mais par respect.

Attention aux pièges :

  • Éviter le « mansplaining menstruel » (« Tu devrais essayer ça, ma sœur/ma copine le fait »).
  • Ne pas réduire les règles à « la faute aux hormones » (c’est une expérience globale : physique, émotionnelle, spirituelle).
  • Accepter que certaines femmes n’aient pas envie d’en parler – et que ce soit légitime.

Exercice concret pour les hommes, pour une alliance cyclique :
Pendant 3 mois, notez dans un journal :
✔ Les phases de la Lune
✔ Les humeurs/changements observés chez votre partenaire (sans les attribuer systématiquement aux règles)
pour une conscience remplie d’amour et de soutien.
✔ Vos propres énergies cycliques (oui, les hommes ont des rythmes hormonaux
aussi !)

« Un homme qui comprend les règles ne domine pas le féminin – il apprend à danser avec. »

 

III. Comment les femmes peuvent se réapproprier leur sang sacré

1. Briser les tabous internalisés

  • Ne plus cacher ses protections hygiéniques comme une honte.
  • Déconstruire toutes les projections patriarcales que l’on a intégré sur « les règles »
  • Parler ouvertement de son cycle avec d’autres femmes.
  • Refuser les discours médicaux qui pathologisent les règles (un pouvoir transformateur, non pas « maladie »).

2. Rituels de réconciliation avec son corps

  • Bain lunaire : Se baigner avec des fleurs, du sel et des intentions de guérison.
  • Peinture corporelle : Utiliser son sang comme lien sacré avec son utérus (pratique ancestrale revisitée).
  • Danse menstruelle : Bouger pour libérer les énergies stagnantes.

3. Rejoindre une lignée de femmes puissantes

  • Les prêtresses de Isis (Égypte) utilisaient leur sang dans les mystères de la renaissance.
  • Les sorcières européennes étaient persécutées car elles connaissaient les secrets des herbes emménagogues.
  • Les chamanes sibériennes entraient en transe pendant leurs règles pour guérir.

Nous sommes les héritières de ces femmes. Reprenons ce qui nous appartient.

Conclusion : Le Retour de la Souveraineté Menstruelle

Les menstruations ou Lunes ne sont pas une malédiction, mais un don spirituel. Les hommes en ont eu peur parce qu’ils ne pouvaient ni le comprendre ni le contrôler. Aujourd’hui, les femmes se réveillent et réclament leur héritage :

  • Notre sang est sacré.
  • Notre cycle est une boussole intuitive.
  • Notre corps est un temple vivant.
  • Moi, Femme je connais mon corps mieux que l’homme.

« Une femme qui connaît la puissance de son sang connaît la puissance de son verbe créateur, et la force des cycles de la Vie encadrée par la naissance et la mort. »

(Pour aller plus loin : Miranda Gray « Lune Rouge », Lara Owen « Honorer son flux », Clarissa Pinkola Estés « Femmes qui courent avec les loups ».)

Marion Rebérat

 

– Si vous utilisez ce texte, merci de nommer vos sources, nom de l’autrice et du site internet –